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Infertilité et PMA : 12 ans de parcours du combattant

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Je n’étais pas  vraiment sûre de vouloir être un jour parent jusqu’à ce ma gynécologue m’annonce que ce serait difficile car je souffre d’infertilité. J’étais alors mariée depuis 2 ans (et en couple depuis 8 ans avec mon mari) lorsque j’ai été diagnostiquée comme souffrant d’ovaires polykystiques.

Peut-être est-ce par esprit de contradiction, mais c’est alors que j’ai pris conscience que devenir mère était la chose la plus importante de ma vie. C’est tout de même ironique que lorsque quelque chose vous est hors de portée, vous décidez de l’avoir à tout prix.

Et c'est ainsi que notre combat contre l'infertilité commença

Pendant 4 ans, j’ai été sous stimulation ovarienne et monitoring ovulatoire. Tout  romantisme a rapidement disparu. Fini les fleurs bleues et les papillons. Les relations sexuelles étaient devenues ciblées et complètement programmées. Ce n’est pas vraiment l’idéal pour un jeune couple et sa vie amoureuse.

Chaque mois, j’avais le cœur brisé. Je me suis mise à prendre beaucoup de poids et à perdre confiance en moi.  Et puis, j’ai fini par abandonner.

Nous sommes partis avec mon mari passer quelques semaines de vacances à l’étranger, pour changer d’air. J’ai fêté mon 30ème anniversaire entourée de mes plus proches amis et j’ai cherché d’autres moyens pour être heureuse, principalement au travers de mon travail. J’ai même perdu du poids.

Et puis, finalement nous nous sommes décidés à rencontrer un spécialiste en infertilité et à nous lancer dans la Procréation Médicalement Assistée (PMA).

Et contre toute attente, je suis tombée enceinte. Naturellement.

J’ai toujours dit que Mr A était mon miracle personnel et je continue de le croire tant cette grossesse était inattendue et a tout changé.

Nutrition enceinte pregnancy
© Isabelle NG

Second bébé, première PMA

Puis, nous avons décidé d’avoir un autre bébé. Il nous a fallu 4 autres années pour y arriver, puisque ayant désormais 35 ans, les statistiques jouaient contre nous.

Cette fois, nous avons dû recourir à la PMA. Je n’ai vraiment pas aimé ces traitements ni les multiples injections. Elles me rendaient nerveuses, irritables. Ce n’était pas facile de caler tous les rendez-vous de monitoring avec mon travail.

Les infirmières n’arrêtaient pas de venir à la maison pour les injections aussi nous avions décidé d’expliquer à Mr A ce qui se passait. Il avait 3 ans et demi aussi nous avions fait les choses simples. Nous lui avions expliqué que Maman était un peu cassée et que le docteur essayait de la réparer. Nous lui avons dit que j’allais recevoir une petite graine de bébé et que j’allais devoir en prendre soin.

Nous avons eu énormément de chance que l’insémination fonctionne dès la première fois. C’était incroyable. La grossesse n’était pas facile puisque j’ai eu très vite un décollement placentaire mais le bébé a tenu bon. Et Little H est né, mon spécial et unique petit garçon.

Motivation Enceinte Pregnant
© Isabelle NG

3ème bébé, le retour de l'infertilité secondaire

A 36 ans, assez naturellement, nous avons décidé d’avoir un autre bébé. Les docteurs nous ont prévenu qu’après 37 ans, il y aurait peu de chances que cela fonctionne alors nous avons démarré une course contre la montre.

J’ai eu deux inséminations artificielles. Cette fois, le miracle ne se produisit pas. J’ai repris du poids et je ne gérais pas très bien les injections hormonales. Lorsque j’ai réalisé que cela ne fonctionnerait pas, j’étais tellement désespérée que mon mari m’a demandé d’attendre quelques mois avant de réessayer, 3 autres fois. Et que cela échoue. Encore.

A partir de ce moment-là, je me suis mise sérieusement à douter sur un dénouement heureux de ce projet.

Nous nous sommes décidés à tenter une FIV, bien que j’ai toujours dit que je ne voulais pas aller jusque-là. J’étais très inquiète par le traitement, mais j’ai tout de même tenté. En fixant toutefois des règles strictes. Je ne tenterais qu’une seule ponction. J’avais 37 ans. J’étais sur le point de perdre mon emploi et l’on commencer à s’inquiéter sérieusement quant au développement de Little H.

Cette fois, nous avons décidé de ne rien dire à Mr A. J’ai fait toutes les injections au domicile de l’infirmière et rien ne s’est passé comme prévu. J’ai fait (presque) tous les effets indésirables. C’est suite à ces traitements que j’ai développé de l’arthrose déformante aux mains.

Je n’allais pas bien du tout mais l’hôpital où j’étais suivie ne s’en inquiétait pas. Tout ce qui les intéressait en moi était mes probabilités statistiques de succès.

Mon expérience au CMCO de Strasbourg ou l'inhumanité des statistiques

J’ai donc effectué une ponction ovarienne. Ce n’était pas aussi douloureux ou effrayant que ce que je craignais. Par contre, j’étais si épuisée qu’ils ont eu beaucoup de mal à me réveiller.

Le pire est venu après la ponction. J’étais de nouveau malade et je n’avais aucun numéro pour prévenir le CMCO qui semblait se désintéresser de mon cas, maintenant qu’ils avaient leurs 13 ovules.

3 jours plus tard, ils m’ont appelé pour me demander d’attendre encore 3 jours pour le transfert puisque seuls 7 embryons avaient pris. Ils avaient l’air contrarié. Alors nous avons attendu. Le jour de l’anniversaire de mon mari, nous étions sur le point de quitter la maison pour nous rendre à l’hôpital pour le transfert lorsque le CMCO m’a rappelé. Ils m’ont vaguement expliqué que quelque chose n’allait pas et qu’ils ne pouvaient effectuer le transfert. Je devais donc attendre leur appel le lendemain.

Le dimanche, le technicien du laboratoire m’a appelé pour m’expliquer qu’il avait dû congeler les 2 embryons survivants et qu’ils ne pourraient pas me les transférer ce mois-ci. Selon leur protocole, mon utérus était trop avancé pour recevoir l’embryon. Il a pris un petit moment pour m’expliquer la technique et ce fut tout. J’étais anéantie. Mon mari aussi.

3 jours plus tard, nous apprenions que Little H était officiellement handicapé et que nous allions devoir trouver une structure pour le prendre en charge. C’était juste avant Noël.

Tout s’est alors effondré, comme je vous l’ai déjà écrit.

rainy days - jours de pluie

Abandonnés face à l'échec

Personne du CMCO ne m’a contacté. La gynécologue libérale qui était censée me suivre n’a jamais appelé. La psychologue chargée d’aider les parents en difficulté non plus.

Nous avons été complètement abandonnés pendant des semaines, des mois. Nous n’étions qu’un numéro de dossiers parmi tant d’autres descendu en bas de la pile . Nous savions que quelque part, dans les cuves du CMCO dormaient nos deux embryons mais nous ne savions quoi faire.

Et puis l’épidémie de Covid19 est survenue et l’ensemble du monde s’est arrêté.  Nous nous sommes alors concentrés sur le diagnostic de Little H et c’était bien assez difficile comme cela.

Lors du déconfinement, nous avons tenté de contacter le CMCO pour savoir comment procéder, ce qu’il fallait faire dans notre cas si particulier. Ce qui est assez ironique est qu’ils étaient plutôt mécontents que nous ne leur ayons pas parlé des problèmes de Little H, tout particulièrement la fameuse gynécologue libérale. Evidemment, ils ont souhaité redémarrer la procédure rapidement mais la généticienne qui suit Little H nous a demandé d’attendre les nombreux résultats génétiques en cours avant cela. Je tiens à préciser que ce n’est pas l’équipe de génétique du CMCO qui s’est occupée de notre cas mais bien celle de l’hôpital Universitaire de Strasbourg.

Inutile de dire que tous ces événements nous ont fait nous poser beaucoup de questions, à mon mari et moi-même, sur nos choix, nos risques, nos décisions.

18 mois plus tard, le transfert

En mars dernier, les résultats génétiques sont arrivés après presque 1 an de recherches. Ils nous ont permis de poursuivre notre projet parental.

J’ai rappelé le CMCO et leur ai demandé de nous remettre sur la liste d’attente. Nous avons été chanceux (et honnêtement je pense que c’était une heureuse erreur) car nous avons été pris en charge immédiatement. Le transfert a pu se faire dès que mon cycle hormonal était prêt.

J’ai donc repris mes traitements hormonaux et j’ai été de nouveau assez malade. Et encore une fois, cela n’intéressait personne.

J’ai effectué seule le transfert d’embryon, mon mari devant rester sur le parking pour garder les enfants, ceux-ci n’ayant pas le droit d’entrer dans l’hôpital avec le protocole Covid19.

Pour la première fois en 2 ans, les infirmières et le docteur ont été bienveillants avec moi. Ils étaient clairement assez mal à l’aise par rapport à mon parcours chez eux et ont même ébauché quelques semblants d’excuses.

Et contre toute attente, le transfert a marché. Le miracle s’est reproduit pour la 3ème fois. Quand j’ai réalisé que j’étais enceinte, je les ai contactés pour savoir ce que je devais faire. On m’a froidement renvoyée vers ma gynécologue habituelle, non sans me rappeler que je devais leur envoyer un dossier pour leurs statistiques. Et c’est tout.

Tout ce qu’ils me voulaient était des chiffres pour alimenter leurs statistiques de performance.

Alors je n’ai pas envoyé les dossiers demandés. Puisque je ne suis qu’un numéro de dossier pour eux, j’ai décidé de ne pas les aider avec leurs chiffres. J’attends un bébé, qui est avant tout un être humain et je ne veux pas que son histoire se limite à leurs statistiques.

Traitement FIV IVF treatment

L'inhumanité de l'infertilité en PMA au CMCO

Je ne suis malheureusement pas la seule à avoir souffert de l’inhumanité du protocole de FIV du CMCO. En France, la loi est très stricte sur tous les protocoles de PMA et les établissements autorisés sont peu nombreux. Ces établissements de santé publique sont donc en situation monopolistique et assez débordés.

La seule chose que ces hôpitaux montrent pour illustrer leurs performances sont leurs statistiques de succès. Il n’y aucun autre indicateur, ni sur les effets secondaires, ni sur le bien-être parental. Rien d’autre que le taux de réussite ou d’échec. C’est tout.

Lorsque j’écris je ne pointe généralement pas du doigt les lieux ou les institutions avec lesquelles j’agis et je ne les cite pas expressément. Mais pour cette fois, j’ai souhaité que les parents qui recherchent un témoignage ou un avis sur cet établissement puissent me trouver et savoir qu’ils ne sont pas seuls dans ce parcours. Et qu’ils doivent être suffisamment forts pour tenir tête au système et poursuivre leur rêve malgré tout.

Pendant près de 12 ans, envers et contre tout, nous avons voulu croire que nous pourrions fonder une famille et accueillir par 3 fois de nouveaux membres. Et nous avons été suffisamment chanceux pour que cela puisse arriver.

Nous en sommes terriblement reconnaissants car nous avons de nombreux amis qui sont toujours en pleine lutte pour fonder leur propre famille, que ce soit contre leur santé, les protocoles hospitaliers ou la loi.

Parfois, il est vraiment difficile de continuer à y croire, d’entrevoir une lueur d’espoir dans tout ce désespoir. Et pourtant, ne perdez pas espoir, il y en a toujours un peu. N’abandonnez pas.

Et si besoin, je suis là.

sans pluie il n'y aurait pas d'arc en ciel - no rain no rainbow

Cet article a 2 commentaires

  1. Prisca

    Quel parcours du combattant, quand je dis que tu es courageuse le mot me semble bien faible. Tout ces moments difficiles où vous avez dû baisser les bras, mais votre détermination a payé, vous voilà à pouvoir réaliser un rêve qui semblait impossible……
    Prends soin de toi pour nous faire à nouveau un joli bébé. Je t’embrasse

    1. Isabelle NG

      Merci ! C’est vrai que c’est un sacré parcours et qui est souvent vécu dans l’ombre. Notre histoire semble finir plutôt bien, nous sommes chanceux. On va faire tout ce qu’il faut en tout cas ! Bises et merci pour ton soutien !

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